L’IA générative va-t-elle accroître l’écart entre les hommes et les femmes ?
L’IA générative va-t-elle accroître l’écart entre les hommes et les femmes ?
par Chiara Sottocorona, Journaliste et Ecrivain
Une étude intéressante publiée le 4 mars par le BCG (Boston Consulting Group) montre que, dans certains cas, les femmes sont à la tête de la révolution numérique. D’autres cas, cependant, soulèvent des questions cruciales sur l’avenir de l’égalité des sexes à la lumière des nouvelles technologies et de l’évolution de l’intelligence artificielle.
Historiquement, les femmes ont souvent été moins enclines à adopter les nouvelles technologies que les hommes. Selon des données de YouGov datant de 2020, les femmes représentaient environ 40 % des « early adopter » aux États-Unis.
Si la tendance se poursuit en ce qui concerne l’adoption des outils de l’IA générative, l’écart dans le secteur technologique pourrait se creuser. D’autant plus si l’on considère que, selon les données du Bureau of Labor en 2023, moins de 30 % de la main-d’œuvre technologique aux États-Unis est composée de femmes. Un pourcentage qui, dans certains pays européens comme l’Italie, est bien inférieur.
L‘évolution de l’intelligence artificielle générative va-t-elle creuser l’écart entre les hommes et les femmes dans le secteur de la technologie ?
Les données de l’étude Women in Tech réalisée par le Boston Consulting Group, présentée en avant-première à l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme, montrent qu’environ 55 % des professionnels masculins et féminins de l’industrie technologique pensent que l’IA générative sera essentielle à la réussite professionnelle, mais il pourrait y avoir des différences dans le niveau d’adoption entre les genres et les niveaux d’âge.
Le BCG a mené une enquête à grande échelle auprès de plus de 6 500 salariés, répartis
équitablement entre hommes et femmes, dans cinq pays de différentes régions du monde (Inde, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne et Japon). Les salariés interrogés occupent des postes techniques (ingénierie, informatique, service client, vente et marketing) et non techniques (ressources humaines, juridique, finance) et appartiennent à quatre niveaux d’ancienneté différents : cadres supérieurs, employés seniors (avec plus de 5 ans d’expérience), cadres subalternes et cadres supérieurs (avec moins de 5 ans d’expérience).
On a demandé à tous les travailleurs à quelle fréquence ils utilisaient l’un ou l’autre des outils de outils de GenAI dans l’exercice de leurs fonctions : de ChatGPT à Google Bard, de Microsoft Copilot aux solutions développées en interne pour permettre aux employés de générer du contenu (texte, code et images).
Les résultats de l’étude sont surprenants : les femmes occupant des postes à responsabilité dans le domaine de la technologie sont plus nombreuses que les hommes à adopter l’IA générative. En particulier, le pourcentage de femmes qui utilisent des outils de GenAI sur le lieu de travail plus d’une fois par semaine s’élève à 75 %, alors que celui des hommes est de 61 %. Ces chiffres confirment que la représentation des femmes au sommet du secteur technologique peut être améliorée à l’avenir.
En revanche, les femmes seniors occupant des emplois non technologiques sont légèrement en retard (63 %) dans l’adoption des outils de GenAI par rapport aux hommes (71 %), une différence de seulement 8 points de pourcentage.
Mais dans le cas des fonctions subalternes, la disparité au détriment des femmes est exacerbée, puisque dans cette tranche, les femmes professionnelles de tous les secteurs semblent être à la traîne dans l’adoption de la GenAI par rapport aux hommes, probablement parce que ces derniers ont davantage accès aux réseaux et aux discussions sur les stratégies de l’IA.
Plus précisément, les jeunes femmes exerçant des fonctions technologiques qui ont utilisé les outils de GenAI sur leur lieu de travail plus d’un an après leur entrée dans l’entreprise sont moins nombreuses que les hommes. Les femmes qui occupent des fonctions technologique 63% ont utilisé la GenAI sur le lieu de travail plus d’une fois par semaine contre 70% des hommes.
Dans le cas des fonctions non technologiques, l’écart est encore plus grand : la différence entre hommes et femmes est de 21 points de pourcentage (48% de femmes utilisent les outils de la GenAI contre 69% des hommes).
En outre, le nombre de femmes juniors dans les projets pilotes ou les initiatives GenAI n’est toujours pas suffisant par rapport à la présence de collègues juniors. Ainsi, si dans le secteur technologique, les femmes occupant des postes à responsabilité peuvent être considérées comme étant à la tête de la révolution déclenchée par l’IA générative, les femmes d’autres secteurs, en particulier celles qui sont en début de carrière, ont du mal à suivre le rythme de l’innovation. « L’étude soulève des questions cruciales sur l’avenir de l’égalité des sexes à la lumière des nouvelles technologies et souligne l’importance de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes dans le nouvelles technologies et l’importance de promouvoir l’inclusion des femmes dans toutes les fonctions et à tous les niveaux d’organisation » explique Paola Scarpa, directrice générale et associée du BCG. « La lutte contre ces inégalités nécessite un engagement permanent et nécessaire de la part des entreprises, et de la société dans son ensemble, pour créer et promouvoir un environnement de travail inclusif où chacun et chacune peut exprimer ses talents. »